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Les Gilets jaunes, un défi journalistique : entretien avec Arnaud MERCIER

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Les Gilets jaunes, un défi journalistique : entretien avec Arnaud MERCIER
Les Gilets jaunes : un défi journalistique
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L’ouvrage dirigé par le sociologue Jean-Marie CHARON et le professeur Arnaud MERCIER fait l'analyse de la médiatisation du mouvement des Gilets jaunes

Ce mardi 3 mai 2022, les Éditions Panthéon-Assas, piliers de la recherche de l’Université Panthéon-Assas depuis 1998, publient l’ouvrage collectif dirigé par le sociologue Jean-Marie CHARON et Arnaud MERCIER, professeur en sciences de l’information et de la communication de l’Université Panthéon-Assas. 

À l’occasion de cette parution, Jean-Marie CHARON et Arnaud MERCIER se sont prêtés au jeu de l’interview pour en faire une présentation.

Éditions Panthéon-Assas : comment est née l’idée de ce livre et pouvez-vous nous le présenter ?

Arnaud MERCIER : Jean-Marie CHARON a animé durant des années l’association Les Entretiens de l’information qui a vocation à organiser des rencontres, des conférences ainsi que des séminaires de réflexion critique sur la médiatisation d’un événement ou d’une question sociale ou politique, en confrontant les regards d’académiques avec ceux des journalistes concernés, ainsi que des acteurs sociaux ayant joué un rôle lors de ces événements ou à propos des questions analysées.

Le mouvement social des Gilets jaunes fut si massif et si problématique à couvrir que cette thématique s’est imposée avec évidence pour les Entretiens de l’année 2020. En tant que membre actif de l’association, j'ai souhaité ajouter aux séminaires de debriefing des journalistes, organisés par Jean-Marie CHARON, un séminaire de master avec les étudiants et étudiantes de l’Institut Français de Presse, en les incitant à choisir pour sujet de mémoire une étude de cas de la médiatisation des Gilets jaunes.

Un partenariat s’est ensuite noué avec nos collègues du LERASS (Laboratoire d’Études et de Recherches Appliquées en Sciences Sociales) à Toulouse dont l’approche était complémentaire puisque travaillant en temps réel sur la circulation des discours concernant les Gilets jaunes. De tous ces travaux convergents est née l’idée de faire un ouvrage collectif.

En quoi la participation d’intervenants venus d’horizons différents – chercheurs, mais aussi journalistes et étudiants de l’Institut Français de Presse – a-t-elle été enrichissante ?

Réunir presque une centaine de journalistes ayant couvert ces événements des semaines durant pour faire un bilan des difficultés rencontrées, et bénéficier de la force de frappe d’une vingtaine d’étudiants de l’IFP qui analysent chacun/chacune un cas précis, confère à cet ouvrage une ampleur que nous n’aurions pas pu saisir à nous deux.

Les séminaires autoréflexifs confrontant des journalistes de statut et d’expérience différents ont été très riches et stimulants. Les corpus médias traités grâce à nos étudiants représentent des dizaines de titres de presse et des dizaines d’heure d’émissions télévisées qui permettent d’appréhender la diversité des lignes éditoriales sur ce mouvement social atypique et souvent conflictuel avec les journalistes au point de casser leurs routines professionnelles, tout en laissant chez eux de profondes interrogations.

Le mouvement des Gilets jaunes a profondément réinterrogé les pratiques journalistiques. Quelles répercussions cela a-t-il eu sur la profession ?

Elles sont trop nombreuses pour toutes les exposer ici. Citons-en simplement quelques-unes. La prise de conscience de la violence subie par les journalistes lors des manifestations est un acquis qui a abaissé pour l’avenir le seuil de tolérance à ces dérives. La prise en compte des réseaux sociaux comme source d’information directe auprès de citoyens mobilisés fait aussi l’objet de discussions au sein des rédactions pour être en mesure de mieux les exploiter désormais. La nécessité d’inventer autre chose pour couvrir un mouvement si hétérogène et singulier dans sa composition et sa durée s’est aussi imposée, et restera sans doute pour de prochaines mobilisations.

Mais le principal bouleversement tient à l’hostilité qui s’est exprimée sur le terrain contre les journalistes, même pour des rédactions et des supports qui s’en croyaient exemptés. Beaucoup de rédactions ont bien entendu le procès en invisibilisation qui leur a été fait par des citoyens dont le sort semblait n’intéresser personne. On voit depuis que de nombreux médias cherchent à donner davantage la parole aux Français ordinaires, à prendre mieux le pouls de la société, dans les campagnes comme dans les villes, ne serait-ce que pour ne plus être pris au dépourvu face à une colère sociale qu’ils n’auraient pas vu monter. Sans doute la condescendance ou l’indifférence à ces invisibles qui pouvait parfois exister a-t-elle disparu.

À quel public s’adresse cet ouvrage ?

Il est évidemment destiné à un très large public. Il intéressera les participants au mouvement des Gilets jaunes et toutes celles et tous ceux qui ont consommé des heures durant sa couverture médiatique en ressentant parfois un malaise, des insatisfactions ou des questionnements auxquels nous apportons des explications.

Le livre offre également un nécessaire retour réflexif sur le travail journalistique lors de ce mouvement inédit, qui intéressera les journalistes et tous les étudiants qui aspirent à le devenir. Par ailleurs, tous les éducateurs et professeurs qui enseignent la distance critique vis-à-vis des couvertures médiatiques trouveront dans ce livre de précieux exemples sur lesquels s’appuyer.

Retrouvez dès à présent cet ouvrage en librairie et en ligne.